Le traitement des boues générées dans les processus de traitement des eaux usées est régi par une législation spécifique, ce qui permet une fois traitée comme il se doit, de les employer dans le secteur agricole en tant que fertilisants. Ainsi, la qualité des boues varie en fonction de la composition de l’eau usée de départ.

CLASSIFICATION DES BOUES

En fonction du critère employé, nous pouvons disposer de 3 classifications des boues générées lors des processus de traitement des eaux usées:

a) Selon l’origine de l’effluent à traiter:

  • Boues urbaines
  • Boues industrielles

b) Selon l’étape du traitement de l’eau usée : Illustration similaire

  • Boues Primaires
  • Boues Secondaires (biologiques)
  • Boues Mixtes
  • Boues Tertiaires (chimiques ou physiques-chimique)

Classification des boues

c) Selon le type de traitement dans la ligne de boues

  • Épaississement : boues Épaissies
  • Stabilisation : boues Stabilisées (digérées)
  • Déshydratation : boues Déshydratées

TRAITEMENT DES BOUES

Après la caractérisation des boues à traiter par différents systèmes d’analyse, parmi lesquels on peut signaler : chromatographie, spectroscopie de fluorescence à Rayons X, analyse bactériologique… on établit les valeurs des paramètres suivants qui permettront de déterminer les processus de traitement des boues plus adaptées sur la base de leur destination finale.

traitement des boues

Concrètement, les paramètres qui ont une influence majoritairement sur la conformité des boues pour leur usage agricole et qui doivent donc être analysées avant et après leur traitement sont:

a) Métaux lourds: Cd, Cr, Ni, Hg, Pb, Zn y Cu

Les métaux lourds sont l’un des paramètres à prendre en compte pour la caractérisation des boues. Depuis les années 70, il s’est produit une réduction très significative du contenu de ces métaux lourds dans les boues des stations d’épuration. Les principales raisons de cette réduction drastique ont été les différentes législations qui ont surgi des différents pays, afin de réguler et de limiter ce type d’éléments à cause de leurs effets nocifs sur l’environnement. Cela a conduit l’industrie et les différentes administrations concernées à développer et optimiser des systèmes de gestion des métaux lourds qui ont permis de réduire les niveaux de métaux lourds émis dans l’environnement. Les deux processus qui ont le plus contribué à ce mouvement sont:

  • Recyclage
  • Substitution

Grâce au développement de technologies toujours plus optimales et de processus alternatifs liés à ces deux points, nous sommes parvenus à réduire très significativement les émissions de métaux comme le Cadmium, dont les émissions dans l’environnement ont diminué de manière drastique sur les 30 ou 40 dernières années. (http://www.cadmium.org/environment/cadmium-emissions)

b) Microorganismes pathogènes : Salmonelle spp, Escherichia colli
c) Agronomiques: pH, Conductivité H, MO, NT, org NH3, P, Ca, Mg, K y Fe
d) Polluants organiques : AOS, LAS, Phtalates, Nonylphénols, Hydrocarbures aromatiques polycycliques, polychlorobiphényles, Dioxines et furanes, Diphényléther bromé

Ainsi, en prenant en compte la ligne de boues on peut différencier 3 grandes étapes de traitement, dans lesquelles on trouve différents processus associés:

1. Épaississement

Les processus de traitement des boues qui représentent cette étape permettent une réduction du volume de la boue à traiter, en éliminant l’eau et en augmentant ainsi la concentration en solides. Le principal objectif est d’augmenter l’efficacité et l’optimisation économiques des processus postérieurs.

Les principaux processus d’épaississement sont:

  • Épaississement par gravité : utilise la force de gravité. L’alimentation se produit dans la zone centrale, dans la partie inférieure sont récupérées les boues épaissies et dans la partie supérieure reste le surnageant. Ce système est utilisé pour les boues primaires, physiques-chimiques et mixtes qui se décantent bien par gravité. Les boues biologiques se décantent lentement
  • L’épaississement par flottaison : la boue se concentre dans la partie supérieure, par l’union de microbulles, généralement d’air, aux solides en suspension, qui sont finalement moins denses que l’eau. Ce type de système est indiqué pour épaissir des boues biologiques à cause de leur faible capacité de sédimentation.
  • Épaississement mécanique : la concentration de boue s’effectue en augmentant les forces gravitationnelles.
    • Centrifugation : une force centrifuge est appliquée, ce qui permet la séparation. Elle s’utilise principalement sur les boues biologiques. Ce sont généralement des appareils très couteux qui exigent des mesures de maintenance adaptées.
    • Tambour rotatif : séparation par filtrage, au travers du tambour rotatif. Il est utilisé dans le cas des boues biologiques. Les coûts d’intervention ne sont pas élevés, ils exigent peu d’espace et ne produisent pas d’odeurs.
    • Tables d’épaississement : la séparation se produit par drainage de l’eau au travers d’une bande horizontale poreuse en mouvement. Elles sont indiquées pour des boues actives ou digérées. Elles ne sont pas adaptées dans le cas de boues physiques-chimiques.

2. Stabilisation

L’un des 3 processus principaux utilisés pour la stabilisation des boues permet une réduction de la MO présente, afin de:

a) Réduire les pathogènes
b) Éliminer les odeurs
c) Réduire ou éliminer la capacité de putréfaction de la MO

Les processus de stabilisation sont divisés en:

2.1. Stabilisation biologique

2.1.1 Stabilisation aérobie

Processus biologique dans lequel, par action microbiologique, la MO est oxydé grâce à un apport d’oxygène dans les digesteurs ouverts. On réduit ainsi la masse finale de la boue, en la modifiant afin de l’adapter aux processus postérieurs.

Elle est utilisée comme traitement secondaire d’une EDAR sans traitement primaire. Elle peut également s’utiliser pour des boues mixtes avec un apport d’oxygène plus élevé. Les facteurs qui influencent ce processus sont:

  • Temps de rétention
  • Température
  • Besoins d’oxygène et de mélange

2.1.2 Stabilisation aérobie thermophile

Il s’agit d’une digestion aérobie auto-thermique développée pour parvenir à répondre à des réglementations toujours plus strictes. Elle se base sur la conservation de l’énergie thermique générée dans la digestion aérobie de la MO des boues, afin d’atteindre et de se maintenir à des températures thermophiles (50-70 ºC).

2.1.3 Compostage

Il s’agit d’un processus de décomposition biologique et de stabilisation de MO dans des conditions contrôlées et aérobies, en développant des températures thermophiles, produit de la chaleur générée biologiquement. Le résultat est un produit stable et libre de pathogènes. La MO se décompose en CO2, en eau, en minéraux et en MO stabilisée.

Il peut s’effectuer uniquement avec des boues ou en les mélangeant à des agents structurants qui facilitent les conditions aérobies. Les principales étapes sont:

  • Mélange
  • Fermentation ou compostage
  • Maturation
  • Raffinage

C’est efficace dans la décontamination de polluants organiques tels que : Hydrocarbures de pétrole, composés mono-aromatiques, explosifs, chlorophénols, certains pesticides et composés aromatiques polycycliques.

Les microorganismes peuvent agir en les minéralisant ou en les transformant partiellement.

Dans le cas des polluants métalliques, ils ne sont pas retirés de manière significative lors du processus. Il se produit des réactions d’oxydation et de réduction de ces polluants qui influencent la solubilité, en réduisant leur disponibilité et toxicité dans la fraction solide.

Il est indispensable de contrôler de manière adéquate les paramètres citrique (pH, aération, humidité, relation C/N) afin d’éviter les conditions anaérobiques dans la masse de compostage qui provoquent une augmentation des odeurs.

2.1.4 Stabilisation anaérobique

C’est l’une des méthodes les plus répandues pour la stabilisation des boues. Elle consiste à dégrader la MO grâce à l’absence d’oxygène, en libérant de l’énergie, du méthane (CH4), du dioxyde de carbone (CO2) et de l’eau (H2O), grâce à l’action de certains types de bactéries.

Elle se produit 4 étapes : Hydrolyse, Acidogénèse, acétogénèse et methanogénèse.

Ces systèmes sont classés en : charge faible, charge élevée, contact anaérobique et avec séparation des gaz. Dans ce processus, il faut contrôler:

  • pH
  • Température
  • Alimentation en vase
  • Temps de rétention
  • Production de gaz

2.2 Stabilisation chimique

C’est une alternative à la stabilisation biologique pour le traitement des boues. L’objectif de ce type de stabilisation est de réduire ou de minimiser les pathogènes et de réduire substantiellement les microorganismes capables de produire des odeurs.

2.2.1 Stabilisation avec calcaire

Le produit majoritairement appliqué est le calcaire. Il est ajouté aux boues à la dose adéquate afin de maintenir le pH à 12 pendant le temps suffisant (minimum 2 h) afin de supprimer ou de réduire les microorganismes pathogènes responsables des odeurs. Ce système est généralement utilisé:

  • Dans les petites stations d’épuration avec incorporation de boues à des terrains naturels ou entreposés avant le transport
  • Stations d’épuration avec besoin de stabilisation supplémentaire
  • Système complémentaire de stabilisation pendant des périodes où les autres systèmes sont hors service

Elle est normalement incorporée avant le séchage des boues mais elle peut également être utilisée à postériori, en utilisant de plus faibles quantités de calcaire. Le dosage de calcaire dépend de:

  • Type de boue
  • Composition chimique de la boue (y-compris la MO)
  • Concentration de la boue

Pendant le processus de traitement des boues par chaux vive, il est nécessaire de maintenir le pH au-dessus de 12 pendant au moins 2 heures, afin de s’assurer de la destruction des pathogènes et de fournir l’alcalinité résiduelle suffisante pour que le pH ne passe pas en dessous de 11. Cela permet d’avoir suffisamment de temps pour l’entreposage ou la disposition de la boue stabilisée La quantité de calcaire nécessaire pour stabiliser la boue est déterminée par le temps de celle-ci, sa composition chimique et la concentration de solides. L’intervalle se trouve environ entre 6 et 51 %. En prenant en compte que les boues primaires sont celles qui exigent le moins de quantité de calcaire et les boues activées celles qui utilisent la plus grande quantité.

2.2.2 Oxydation avec chlore

On incorpore une dose élevée de chlore à la boue à traiter. Elle est effectuée dans des réacteurs fermés et elle nécessite des périodes de rétention courtes. Ce système n’est pas encore étendu au niveau industriel.

SYSTÈME AVANTAGES INCONVÉNIENTS
STABILISATION BIOLOGIQUE AÉROBIE
  • Contrôle facile et exploitation
  • CAPEX bas
  • Risques d’exploitation faibles (non inflammable)
  • Boues biologiquement inoffensives et stables.
  • Résidu final applicable aux terrains naturels
  • Réduction de solides volatiles
  • Réduction presque totale des odeurs
  • Résultat faible avec froid
  • OPEX élevé car consommation énergétique élevée
  • Résultats faibles dans les unités de séchage
  • Volume important du réacteur
THERMOPHILE
  • Destruction élevée de solides volatiles
  • Volume bas du réacteur
  • Boues nettoyées
  • besoin inférieur d’oxygène spécifié (30-40 % de moins que les processus conventionnels)
  • Boues déshydratées plus sèches
  • Épaississement préalable nécessaire
  • Agitation élevée
  • Réservoir avec bon isolant thermique
  • Odeurs occasionnelles
  • Mousses
  • Consommation de polyélectrolyte plus élevée
COMPOSTAGE
  • CAPEX et OPEX raisonnables dans les processus peu intensifs
  • Haute réduction du volume initial de boue
  • Haute réduction humidité (60-70 %)
  • Décomposition et stabilisation de la matière organique
  • Réduction élevée du poids dans le produit final
  • Boues nettoyées : élimination des pathogènes et parasites et inhibition des graines
  • Réduction significative des odeurs
  • Produit final optimal pour utilisation comme fertilisant ou modification organique
  • CAPEX OPEX élevés dans des systèmes modernes de compostage (tunnels et canaux)
  • Nécessité de grandes surfaces principalement en technologies peu intensives (compostage en piles)
  • Pas de récupération énergétique
  • Gestion problématique des eaux générées dans le processus
  • Nécessité d’agents structurants
  • Production de poussière et aérosols dans certains types de compostage
  • Dans des installations à l’air libre le processus de compostage en hiver est ralenti
  • Génération d’odeurs qui exige un contrôle des paramètres critiques
ANAÉROBIQUE
  • Volume inférieur du réacteur
  • Réduction de biomasse
  • Réduction de pathogènes
  • Consommation énergétique plus faible
  • Récupération énergétique (CH4)
  • Élimination des odeurs
  • OPEX bas
  • CAPEX élevés
  • Processus lent
  • Contrôle exhaustif des paramètres critiques
ESTABILISATION CHIMIQUE CAL
  • CAPEX et OPEX bas
  • Forte réduction des agents pathogènes
  • Haute réduction des odeurs
  • Plus grand volume utilisable
  • Neutralisation sans frais en sols acides
  • Méthode de sauvegarde pour d’autres systèmes de stabilisation
  • Produit final adapté à l’agriculture (teneur élevée en chaux et en azote)
  • Contrôle du pH critique pour éviter la réapparition des odeurs et des agents pathogènes
  • Les ajustements de pH peuvent provoquer des émissions de gaz (pH élevé de l’ammoniac // faible pH sulfurique)
  • Coûts de transport plus élevés en raison de l’augmentation du volume du produit final

2.3 Conditionnement

Les boues à consistance gélatineuse peuvent rendre les opérations de séchage plus difficiles. Dans ces cas, on réalise un conditionnement préalable pour améliorer les caractéristiques de la boue pour sa déshydratation. Les méthodes les plus fréquentes sont:

2.3.1 Conditionnement chimique

Il donne comme résultat la coagulation des solides et la libération de l’eau absorbée, il s’utilise avant le processus de séchage. Les produits chimiques utilisés sont:

  • Chlorure de fer
  • Calcaire
  • Sulfate d’alumine
  • Polymères organique

Les 3 premiers permettent la désinfection et la stabilisation de la boue. Les polymères ne provoquent pas de désinfection mais ils sont plus faciles à alimenter et sont généralement plus économiques.

L’objectif de ce type de stabilisation est de réduire ou de minimiser les pathogènes et de réduire substantiellement les microorganismes capables de produire des odeurs.

2.3.2 Conditionnement thermique

On effectue un chauffage des boues à des températures qui varient entre 160-210 ºC pendant de courtes périodes de temps sous pression. Cela provoque une coagulation des solides et un changement dans la structure, ce qui réduit l’affinité de l’eau de la part des solides de la boue.

La boue est stérilisée, pratiquement désodorisée et sa capacité de déshydratation augmente significativement

3. Déshydratation

Il s’agit d’une opération physique (naturelle ou mécanique) employée pour réduire le taux d’humidité de la boue et son volume. Ses principaux objectifs sont:

  • Augmenter la teneur en matière sèche de seulement 3-40%
  • Diminuer les coûts de transport par réduction de volume
  • Améliorer la manipulation et le transport des boues
  • Éviter les odeurs
  • Augmenter le pouvoir calorifique par baisse de l’humidité

Les systèmes les plus répandus sont les systèmes mécaniques devant les systèmes naturels. Du point de vue économique, les technologies de déshydratation prévalent dans l’ordre décroissant:

  • Centrifuges
  • Filtres de presse de courroie
  • Filtres de presse

3.1 Systèmes mécaniques

3.1.1 Centrifuges

Il consiste en un tambour cylindrique-conique à essieu horizontal qui s’appuie sur la force de centrifugation pour la séparation de la phase solide de l’eau. Il y a deux types de centrifugation dans la déshydratation des boues:

a) Centrifugation contre le courant -: les solides et le cylindre circulent dans le sens contraire dans le cylindre.
b) Centrifugation équicourant : la fraction solide et la fraction liquide s’écoulent dans le même sens.

3.1.2 Filtre de presse

Les filtres presse disposent d’une série de plaques rectangulaires verticales disposées les unes derrière les autres sur un châssis. Sur les faces de ces plaques sont placés des tissus filtrants, généralement en tissus synthétiques. L’espace qui reste entre deux plaques, dans leur partie centrale creuse, est l’épaisseur qui sera acquise par la tourte résultante. Cette épaisseur peut varier entre 15 et 30 mm.

La surface des filtres presse peut mesurer jusqu’à 400 m2, et la surface des plaques de 2 m2. Ces filtres sont généralement formés de plus de 100 plaques. Le processus de filtrage varie entre 25 heures, en fonction e la durée des différentes étapes qui sont énumérées ci-dessous:

  • Remplissage
  • Filtrage
  • Téléchargement
  • Nettoyage

Avec ce processus de traitement des boues, on obtient une étanchéité de 35-45 % en fonction des caractéristiques des boues à traiter. Il est nécessaire de disposer d’une personnel spécialisé et qualifié pour sa maintenance et son exploitation.

3.1.3 Filtre de bande

C’est un système d’alimentation continu de vase, où est également réalisé un conditionnement chimique, généralement avec des poly électrolytes.

Dans les filtres à bande il se produit d’abord un drainage par gravité et ensuite il passe à la vase par une application mécanique de pression pour que se produise la déshydratation, grâce à l’action d’un tissu poreux.

C’est une méthode bon marché, car elle ne nécessite pas un grand investissement initial, les coûts de maintenance et d’exploitation sont bas et l’installation représente une faible consommation énergétique.

3.2 Systèmes naturels

3.2.1 Temps de séchage

Il s’agit d’un système de déshydratation naturelle. Ce sont des couches de matériel disposées à la verticale dans un réceptacle.

La vase passe sur ces couches de gravier ou de sable, ce qui produit le filtrage et la déshydratation des boues par évaporation. Cette évaporation dépendra des conditions climatiques de la zone , les jours d’exposition des boues et les caractéristiques de la boue.

Le matériel drainant est généralement formé de couches de 10 cm de sables avec une couche de gravier de 10-20 cm, en plaçant un réseau de tuyauteries dans la partie inférieure pour récupérer l’eau qui sera à nouveau traitée dans l’E.D.A.R. La couche de sable doit être remplie régulièrement car du sable se perd dans le processus de filtrage et la récupération des boues.

L’inconvénient présenté par ce processus est la grande surface de terrain nécessaire.

Par Sergio Tuset

Ingénieur Chimiste

Fondateur de Condorchem Envitech. Spécialiste prestigieux en ingénierie appliquée à la gestion des eaux usées et au contrôle des émissions atmosphériques, auteur de divers brevets environnementaux et de nombreuses publications techniques.

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